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Rétrospective: Une année de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme au Maroc (2024)

Cybercriminalité, crypto-blanchiment, affaires de corruption… La lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme a été plus que jamais d’actualité en 2024. Le Maroc, sorti de la liste grise du GAFI, poursuit sa mobilisation. Découvrez les temps forts de cette année charnière et les défis qui attendent le Royaume.

L’année 2024 a été particulièrement marquante en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT) au Maroc. Ce domaine, d’une importance capitale pour l’intégrité du système financier national et la sécurité du Royaume, tel que stipulé dans la loi n° 43-05 modifiée et complétée par la loi n° 12-18 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux a connu des évolutions significatives, tant sur le plan réglementaire qu’opérationnel.

Le Maroc, conscient des enjeux liés à la criminalité financière transnationale, a poursuivi ses efforts pour renforcer son dispositif national de LBC/FT et se conformer aux standards internationaux les plus exigeants. Cette volonté s’est traduite par une série de mesures concrètes visant à améliorer l’efficacité du système de détection, de prévention et de répression des infractions de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme.

L’année 2024 a débuté sous de bons auspices pour le Maroc, le Royaume ayant été retiré de la liste grise du GAFI en 2023. Fort de cette reconnaissance internationale des progrès accomplis en matière de LBC/FT, le Maroc a abordé l’année 2024 sans être intégré dans aucune liste de surveillance, que ce soit celle de l’Union européenne ou du GAFI. Toutefois, l’émergence de nouvelles menaces, notamment la cybercriminalité et le crypto-blanchiment, impose une vigilance accrue et une adaptation constante du dispositif national.

Ce bilan annuel se propose d’analyser les principales évolutions législatives, réglementaires et jurisprudentielles qui ont marqué l’année 2024, en mettant l’accent sur les défis et les perspectives de la LBC/FT au Maroc. Nous examinerons notamment :

  • Le renforcement du dispositif national de LBC/FT, avec l’opérationnalisation de l’Observatoire National de la Criminalité, la mise en conformité du dispositif national avec les normes internationales, la certification ISO 27001 de l’ANRF, l’adoption d’une stratégie nationale de LBC/FT, le renforcement de la coopération nationale et internationale, et la lutte contre la corruption et le blanchiment dans le secteur de la retraite.
  • La lutte contre le terrorisme, avec les modifications de la liste des sanctions de l’ONU, la coopération internationale et la participation à des opérations antiterroristes, et les efforts du Maroc dans la lutte contre la traite des êtres humains.
  • La sensibilisation et la formation, avec le séminaire de l’AMMC pour les acteurs du marché des capitaux, et les regards croisés Maroc-Espagne sur le rôle du notaire.
  • Les typologies de blanchiment et de financement du terrorisme, avec une analyse des cas marquants de l’année 2024, notamment les affaires de corruption et de blanchiment d’argent, l’utilisation des casinos et des crypto monnaies pour le blanchiment, l’affaire « Escobar du Sahara », et le trafic d’êtres humains.
  • La protection des données personnelles, avec une analyse des développements réglementaires ( loi n° 09-08 ) et jurisprudentiels en matière de protection des données personnelles, en mettant l’accent sur les synergies avec la LBC/FT et les défis posés par les nouvelles technologies. Nous aborderons notamment la question du rapprochement avec le RGPD européen, la coopération internationale en matière de protection des données, les affaires de violation de la vie privée, l’adaptation de la loi n° 09-08 aux nouvelles technologies, et les initiatives de conformité dans le secteur médical.

I. Renforcement du dispositif national de LBC/FT

L’année 2024 a été marquée par une consolidation significative du dispositif national de LBC/FT. Le Maroc a démontré sa ferme volonté de se conformer aux standards internationaux les plus exigeants et de lutter efficacement contre la criminalité financière, en s’appuyant sur plusieurs axes d’intervention :

a. Amélioration du cadre institutionnel et opérationnel:

  • L’opérationnalisation de l’Observatoire National de la Criminalité : Le Maroc se dote d’un nouvel outil dans la lutte contre la criminalité : l’Observatoire national de la criminalité (ONC). En vertu des articles 10 et 13 de l’arrêté du ministre de la Justice n° 1501-22 du 22 rebia I 1444 (19 octobre 2022, version arabe) l’ONC est chargé de collecter des données statistiques auprès des autorités compétentes afin de détecter le phénomène criminel et de proposer des solutions pour le prévenir, contribuant ainsi à l’élaboration de politiques pénales éclairées et à l’optimisation de l’action des acteurs judiciaires.
  • La certification ISO 27001 de l’Autorité Nationale du Renseignement Financier (ANRF) : L’ANRF a obtenu la certification ISO 27001, confirmant son engagement envers les normes de sécurité nationales et internationales et sa capacité à gérer efficacement les risques. Cet accomplissement renforce la position de l’ANRF en tant qu’acteur de confiance et met en avant ses efforts pour consolider la culture de la cyber sécurité parmi son personnel. L’ANRF réitère son engagement à se conformer pleinement à la législation sur la sécurité de l’information, aux recommandations de la Direction générale de la sécurité des systèmes d’information et aux normes internationales.
  • La publication des rapports annuels de l’ANRF et de l’Autorité Marocaine du Marché des Capitaux (AMMC) offre une transparence accrue sur les activités de ces institutions et permet d’apprécier l’efficacité du dispositif national de LBC/FT. Le rapport de l’ANRF témoigne des efforts déployés pour renforcer le dispositif national et la coopération internationale, marqués notamment par la sortie du pays de la liste grise du GAFI.

b. Renforcement du cadre légal et réglementaire:

  • Le parachèvement de la mise en conformité du dispositif national avec les normes internationales, notamment les recommandations du GAFI, constitue une avancée majeure. Cette harmonisation renforce la crédibilité du Maroc sur la scène internationale et facilite la coopération avec les autres pays dans la lutte contre la criminalité financière.
  • L’adoption d’une Stratégie nationale de LBC/FT permet de définir les orientations stratégiques et les priorités du Maroc en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Ce document cadre vise à assurer une cohérence et une coordination des actions menées par les différents acteurs impliqués.
  • Renforcement du cadre réglementaire de la lutte contre le blanchiment d’argent: Le Maroc a renforcé son cadre réglementaire en matière de LBC/FT, notamment en ce qui concerne l’identification des clients, la surveillance des transactions suspectes, et la coopération entre les différents acteurs impliqués dans la lutte contre le blanchiment d’argent.

c. Coopération nationale et internationale :

-Le renforcement de la coopération avec le Mali et les Émirats Arabes Unis en matière de LBC/FT, à travers la signature d’accords bilatéraux, illustre la volonté du Maroc de collaborer avec ses partenaires régionaux et internationaux pour lutter contre la criminalité financière transnationale :

1. Coopération Maroc-Mali : Visite du Président du Conseil Economique, Social, Culturel et Environnemental du Mali

Dans le cadre du renforcement de la coopération Sud-Sud promue par le Maroc, M. Jawhar NFISSI, Président de l’Autorité Nationale du Renseignement Financier (ANRF), a reçu le 23 janvier 2024 une délégation malienne conduite par M. Yacouba KATILE, Président du Conseil Économique, Social, Culturel et Environnemental du Mali. Cette rencontre a permis à l’ANRF de présenter l’expérience et l’expertise marocaine en matière de Lutte contre le Blanchiment des Capitaux et le Financement du Terrorisme (LBC/FT). Le Mali a exprimé un vif intérêt pour cette expertise et sollicité l’appui de l’ANRF. Les deux parties ont convenu de poursuivre le dialogue et de renforcer leur coopération en matière de LBC/FT, s’inscrivant ainsi dans la vision royale de solidarité et de partenariat gagnant-gagnant.

2. Le Maroc et les EAU renforcent leur coopération en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme

Dans le cadre d’une coopération bilatérale renforcée entre les Émirats arabes unis et le Maroc en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, M. Hamid AlZaabi, directeur général du Bureau exécutif émirati, a accueilli une délégation marocaine dirigée par M. Jawhar Al-Nafisi, président de l’Autorité nationale de l’information financière. Les discussions ont porté sur l’amélioration des normes de conformité dans la région MENA, le partage d’expertise et les meilleures pratiques, notamment en matière d’IA et d’actifs virtuels. Des comités conjoints ont été créés pour assurer le suivi et la mise en œuvre du protocole d’accord entre les deux institutions. La délégation marocaine a également bénéficié de présentations sur l’expérience émiratie en matière de contrôle et de non-prolifération, ainsi que sur l’analyse des cas liés aux actifs virtuels.

· Rapport conjoint Banque de Maurice – Bank Al-Maghrib :

La coopération régionale s’est également illustrée par la publication d’un rapport conjoint entre la Banque de Maurice et Bank Al-Maghrib sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme au sein des juridictions du groupe des superviseurs bancaires francophones. Ce rapport met en évidence l’importance du partage d’expériences et de bonnes pratiques entre les pays francophones pour renforcer l’efficacité de la LBC/FT.

· Sanction de l’AMMC :

L’année 2024 a également été marquée par des sanctions prononcées par l’AMMC en matière de LBC/FT. À titre d’exemple, la société « Valoris Management » a été sanctionnée d’une amende de 50 000 dirhams pour insuffisance d’identification des clients et des bénéficiaires effectifs. Cette décision rappelle l’importance du respect des obligations de vigilance et la sévérité des sanctions encourues en cas de manquement.

· RAPPORT INTERPOL DE 2024 SUR L’ÉVALUATION DES CYBERMENACES EN AFRIQUE : Dans un contexte marqué par la digitalisation croissante des activités et l’essor des nouvelles technologies, la cybercriminalité représente une menace préoccupante, y compris pour la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Le rapport INTERPOL de 2024 sur l’évaluation des cyber menaces en Afrique offre un éclairage précieux sur ce phénomène et ses implications pour la LBC/FT.

** L’opération Echoes, menée conjointement par les autorités marocaines, INTERPOL, Microsoft et Group-IB, a permis de démanteler un réseau de cybercriminels utilisant un kit d’hameçonnage pour voler des données et les monétiser sur le dark web. Cette opération témoigne de l’engagement du Maroc dans la lutte contre la cybercriminalité et de sa collaboration active avec les acteurs internationaux et privés.

** L’opération Echoes a également mis en lumière l’évolution des techniques d’ingénierie sociale utilisées par les cybercriminels. Le rapport INTERPOL souligne que ces derniers ciblent méticuleusement leurs victimes, notamment les dirigeants d’entreprises, et utilisent des services légitimes pour accroître l’efficacité de leurs campagnes d’hameçonnage. L’utilisation croissante de l’intelligence artificielle pour masquer les signaux d’alerte traditionnels représente un défi supplémentaire pour les autorités.

· Coopération inter-autorités et lutte contre la corruption:

La lutte contre la corruption, qui est étroitement liée à la LBC/FT, a également fait l’objet d’une attention particulière en 2024. La quatrième réunion annuelle des quatre Autorités (ANRF, AMMC, ACAPS et Instance Nationale de la Probité, de la Prévention et de la Lutte contre la Corruption) a permis de dresser un bilan des efforts déployés et d’adopter une feuille de route pour 2024. L’adoption de la norme ISO 37001 par plusieurs organismes nationaux et la publication d’une directive relative à la gestion du risque de corruption par les établissements de crédit témoignent de la volonté du Maroc de renforcer son dispositif de prévention et de lutte contre la corruption.

d. Extension du champ d’application de la LBC/FT :

La lutte contre la corruption et le blanchiment d’argent dans le secteur de la retraite constitue un axe d’intervention important. Les mesures prises visent à prévenir et à détecter les flux financiers illicites liés à la corruption et au détournement de fonds dans ce secteur sensible.

  • Politique anti-corruption de l’ACAPS: L’Autorité de Contrôle des Assurances et de la Prévoyance Sociale (ACAPS) a publié sa politique anti-corruption, qui vise à prévenir et à détecter la corruption au sein du secteur des assurances et de la prévoyance sociale.
  • Lutte contre le Blanchiment de Capitaux et le Financement du Terrorisme dans le secteur de la retraite: Des mesures ont été prises pour renforcer la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme dans le secteur de la retraite, notamment en ce qui concerne l’identification des clients et la surveillance des transactions suspectes.
  • Promotion de l’intégrité du système financier contre les flux illicites: Bank Al-Maghrib a mis en place des mesures pour promouvoir l’intégrité du système financier et lutter contre les flux illicites, notamment à travers la surveillance des transactions bancaires et la coopération avec les autres autorités compétentes.

Ces différentes initiatives témoignent de l’engagement continu du Maroc à renforcer son dispositif national de LBC/FT et à s’adapter aux nouvelles menaces qui pèsent sur l’intégrité du système financier.

II. Focus sur la lutte contre le terrorisme

La lutte contre le terrorisme demeure une priorité absolue pour le Maroc. En 2024, le Royaume a intensifié ses efforts pour contrer cette menace, en agissant sur plusieurs fronts :

a. Adaptation aux évolutions de la menace terroriste:

Le Comité des sanctions contre l’EIIL (Daech) et Al-Qaida a, en effet, procédé à de multiples modifications de sa liste de sanctions tout au long de l’année 2024, témoignant de la dynamique de la menace terroriste et de la nécessité d’une vigilance permanente. Ces modifications, qui ont impliqué l’ajout, la suppression ou la modification d’entrées, démontrent la nécessité d’une adaptation constante du dispositif national de lutte contre le financement du terrorisme afin de tenir compte de l’évolution des groupes terroristes et de leurs modes opératoires. Plus précisément, le Comité a adopté les résolutions suivantes :

  • SC/15916 – 3 décembre 2024 : Modification de trois entrées dans la liste des sanctions.
  • SC/15812 – 23 août 2024 : Retrait d’une entrée sur la liste des sanctions.
  • SC/15682 – 25 avril 2024 : Modification d’une entrée dans la liste des sanctions.
  • SC/15664 – 15 avril 2024 : Modification d’une entrée de la liste relative aux sanctions, adoptée par le Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1718 (2006).
  • SC/15618 – 8 mars 2024 : Modification d’une entrée de la liste relative aux sanctions, adoptée par le Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1718 (2006).
  • SC/15581 – 7 février 2024 : Modification de 85 entrées dans la liste des sanctions.
  • SC/15560 – 10 janvier 2024 : Modification de 14 entrées dans la liste des sanctions.
  • SC/15556 – 5 janvier 2024 : Modification de cinq entrées dans la liste des sanctions.
  • SC/15555 – 5 janvier 2024 : Modification de deux entrées de la liste relative aux sanctions, adoptée par le Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1718 (2006).

Ces neuf résolutions illustrent l’évolution constante de la menace terroriste et la nécessité pour les États, dont le Maroc, de maintenir une vigilance accrue et d’adapter continuellement leurs dispositifs de lutte contre le financement du terrorisme.

b. Coopération internationale renforcée:

  • Le Maroc a activement participé à l’opération antiterroriste « Neptune VI » coordonnée par Interpol, qui a mobilisé 14 pays. Cette opération conjointe illustre l’importance de la coopération internationale pour démanteler les réseaux terroristes et entraver leurs capacités de financement.
  • La coopération avec les Émirats Arabes Unis en matière de LBC/FT a été renforcée, notamment à travers l’échange d’informations et de bonnes pratiques.

c. Lutte contre la traite des êtres humains:

  • Le Maroc a également intensifié ses efforts dans la lutte contre la traite des êtres humains, un fléau souvent lié au financement du terrorisme. Les autorités marocaines ont procédé à l’arrestation de plus de 700 suspects impliqués dans des affaires de traite. Ces efforts ont été salués par les États-Unis, qui ont reconnu le rôle du Maroc comme un partenaire clé dans la lutte contre ce crime transnational.
  • La coopération avec la Côte d’Ivoire a été renforcée afin de mieux coordonner les actions de lutte contre la traite des êtres humains dans la région.

L’engagement du Maroc dans la lutte antiterroriste s’inscrit dans un cadre national et international. Le Royaume coopère activement avec les organisations internationales et les pays partenaires pour contrer cette menace globale.

· Coopération sécuritaire avec la Belgique :

La coopération internationale s’est également illustrée par la rencontre entre Abdelatif Hammouchi, Directeur Général de la DGSN et de la DGST, et Francisca Bostyn, Directrice Générale de la Sûreté de l’Etat de Belgique. Cette rencontre, qui a notamment porté sur la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme, témoigne de la volonté du Maroc de renforcer ses partenariats avec les pays européens pour contrer les menaces sécuritaires communes.

· Indice mondial du terrorisme :

Enfin, le Maroc a été distingué pour sa sécurité selon l’Indice mondial du terrorisme 2024. Cette reconnaissance internationale confirme l’efficacité de la stratégie marocaine en matière de lutte contre le terrorisme et son engagement à préserver la sécurité et la stabilité du Royaume.

III. Sensibilisation et formation

La sensibilisation et la formation des professionnels et du public constituent un pilier essentiel de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. En 2024, plusieurs initiatives ont été menées dans ce domaine :

  • Séminaire de l’AMMC pour les acteurs du marché des capitaux: L’Autorité Marocaine du Marché des Capitaux (AMMC), en partenariat avec l’ANRF et la CNASNU, a organisé un séminaire de sensibilisation sur la LBC/FT à destination des acteurs du marché des capitaux. Cette initiative vise à renforcer la connaissance et la compréhension des obligations légales et réglementaires en matière de LBC/FT par les professionnels de ce secteur exposé aux risques de blanchiment.
  • Regards croisés Maroc-Espagne sur le rôle du notaire: Un échange d’expertise entre le Maroc et l’Espagne a été organisé sur le rôle du notaire dans la lutte contre le blanchiment d’argent. Les notaires, en tant que professionnels du droit, jouent un rôle crucial dans la prévention et la détection des opérations suspectes, notamment lors de transactions immobilières. Ce partage d’expérience permet de renforcer les compétences des notaires et de promouvoir les bonnes pratiques en matière de LBC/FT.

Ces actions de sensibilisation et de formation contribuent à :

  • Améliorer la connaissance des risques liés au blanchiment de capitaux et au financement du terrorisme.
  • Renforcer la vigilance des professionnels et leur capacité à détecter les opérations suspectes.
  • Promouvoir une culture de conformité aux obligations légales et réglementaires en matière de LBC/FT.

La sensibilisation et la formation constituent un investissement essentiel pour garantir l’efficacité du dispositif national de LBC/FT.

IV. LBC/FT : panorama des affaires marquantes de 2024

L’année 2024 a été marquée par une diversité de cas de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme, mettant en lumière l’évolution des typologies et des modes opératoires employés par les criminels. Voici une analyse des affaires les plus marquantes :

a. Affaires de corruption et de blanchiment d’argent:

  • Enquête sur 5 000 affaires douteuses de blanchiment d’argent: Le gouvernement a ouvert des enquêtes sur un nombre important d’affaires de blanchiment d’argent, témoignant de l’ampleur du phénomène et de la détermination des autorités à le combattre.
  • Saisie de biens et de comptes bancaires de parlementaires: Des parlementaires ont été impliqués dans des affaires de blanchiment d’argent, conduisant à la saisie de leurs biens et de leurs comptes bancaires. Ces affaires mettent en évidence la nécessité de renforcer l’intégrité et la transparence dans la vie publique.
  • Scandale financier à Khouribga impliquant de hauts responsables: Un scandale financier a éclaté à Khouribga, impliquant de hauts responsables. Cette affaire illustre la vulnérabilité de certaines institutions à la corruption et au détournement de fonds publics.

b. Utilisation des casinos et des crypto monnaies pour le blanchiment:

  • Surveillance des casinos pour blanchiment d’argent: Les casinos sont des secteurs à risque en matière de blanchiment d’argent. Les autorités ont renforcé la surveillance de ces établissements afin de prévenir et de détecter les opérations suspectes.
  • Transactions bancaires suspectes et crypto-blanchiment à Casablanca: Une affaire de crypto-blanchiment a été détectée à Casablanca, mettant en évidence les nouveaux défis posés par les crypto monnaies en matière de LBC/FT.
  • Affaire casino Es Saadi: Cette affaire, qui a traîné en longueur, démontre la complexité des enquêtes et des poursuites judiciaires dans les affaires de blanchiment d’argent liées aux casinos.

c. Affaire « Escobar du Sahara »:

  • Achats d’or massifs et suspects liés au blanchiment d’argent: L’affaire « Escobar du Sahara » a mis en lumière l’utilisation de l’or comme instrument de blanchiment d’argent. Des achats massifs et suspects d’or ont été réalisés, soulevant des inquiétudes quant à l’origine des fonds.
  • Affaire « Escobar du Sahara » : Bank Al-Maghrib brise le silence: Bank Al-Maghrib est intervenue dans cette affaire, mettant en évidence le rôle des institutions financières dans la prévention et la détection du blanchiment d’argent.

d. Trafic d’êtres humains:

  • Opération de surveillance de la douane marocaine: La douane marocaine a mené une vaste opération de surveillance pour lutter contre le trafic d’êtres humains, un crime souvent lié au financement du terrorisme.
  • Sanctions prononcées par Bank Al-Maghrib dans le secteur bancaire: Bank Al-Maghrib a prononcé des sanctions à l’encontre de banques impliquées dans des affaires de trafic d’êtres humains, soulignant la responsabilité des institutions financières dans la lutte contre ce fléau.

Ces cas marquants illustrent la diversité des typologies de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme, ainsi que les défis auxquels le Maroc est confronté. Ils soulignent la nécessité d’une vigilance accrue, d’une adaptation constante du dispositif national de LBC/FT et d’une coopération renforcée entre les différents acteurs impliqués.

V. Protection des données et LBC/FT

Au-delà des mesures spécifiques à la LBC/FT, l’année 2024 a également été marquée par des développements importants dans le domaine de la protection des données personnelles, un domaine connexe qui présente des synergies avec la lutte contre la criminalité financière.

a. Le rapprochement avec le RGPD : une nécessité croissante

  • La protection des données personnelles est un sujet de plus en plus important dans le contexte actuel de la digitalisation. Le rapprochement du cadre juridique marocain avec le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) européen semble inévitable pour garantir une protection adéquate des données des citoyens marocains. Ce rapprochement permettrait notamment de renforcer les droits des personnes concernées, d’harmoniser les pratiques des entreprises et de faciliter les échanges de données avec l’Union européenne.

b. Coopération Sud-Sud et protection des données

  • Le Maroc joue un rôle actif dans la promotion de la protection des données au niveau régional. La première réunion à Dakhla des Autorités de protection des données à caractère personnel du Maroc et des pays du Sahel illustre cette volonté de coopération Sud-Sud. Cette rencontre a permis d’échanger les bonnes pratiques et de discuter des défis communs en matière de protection des données dans un contexte marqué par l’essor des nouvelles technologies.

c. Respect de la vie privée : le cas Ikea

  • L’affaire Ikea, qui a enfreint les lois marocaines sur la protection des données personnelles et le respect de la vie privée, rappelle que les entreprises sont tenues de respecter les droits des citoyens en matière de protection de leurs données. Cette affaire met en évidence l’importance de la vigilance et de la conformité à la loi n° 09-08 sur la protection des personnes physiques à l’égard des traitements de données à caractère personnel.

d. Adaptation de la loi n° 09-08 aux nouvelles technologies

  • Les nouvelles technologies, telles que le big data, l’internet des objets et l’intelligence artificielle, posent de nouveaux défis en matière de protection des données personnelles. La loi n° 09-08, conçue avant l’émergence de ces technologies, doit évoluer pour mieux prendre en compte ces enjeux et garantir une protection efficace des données des citoyens marocains.

e. CNDP et SMSM : une approche commune pour la conformité

  • La CNDP et la SMSM ont convenu d’une approche commune pour assurer la conformité des traitements de données à caractère personnel dans le domaine médical. Cette initiative vise à garantir la protection des données des patients tout en permettant l’utilisation de ces données à des fins de recherche et de santé publique.

L’année 2024, marquée par la sortie du Maroc du processus de suivi renforcé du GAFI, a confirmé l’engagement du Royaume dans la lutte contre la criminalité financière. Le dispositif national de LBC/FT, en constante évolution, s’est enrichi de nouvelles mesures pour contrer les menaces traditionnelles et les nouveaux défis liés à la digitalisation, notamment la cybercriminalité et le crypto-blanchiment. Le Maroc a renforcé son cadre légal et institutionnel, intensifié la coopération nationale et internationale, et promu la sensibilisation des professionnels et du public.

Malgré ces avancées, le Maroc doit rester vigilant face à l’évolution rapide des techniques de blanchiment et de financement du terrorisme. Renforcer les capacités d’investigation, promouvoir une culture de conformité, sensibiliser le grand public et poursuivre la coopération internationale sont autant de défis à relever pour consolider les acquis et garantir l’efficacité du dispositif national de LBC/FT.

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